lundi 10 janvier 2011

La nature, c'est sale, il ne faut pas y toucher

Entendu aujourd'hui à la radio, un projet de loi visant à interdire l'utilisation directe des plantes comme médicaments est en préparation. Dit comme cela, on peut imaginer que c'est une façon d'éviter le charlatanisme, sauf que... sauf que le journaliste creuse un peu et demande à son interlocuteur, qui est chimiste :
"Est-ce que cela signifie que le simple citoyen n'aura théoriquement plus le droit de ramasser des herbes devant chez lui pour se faire des tisanes ou des remèdes maison ?"
Réponse catégorique mais bafouillante de l'intervenant :
"Bien entendu, on ne peut pas laisser faire n'importe quoi aux gens. Il faut un minimum de contrôle. Ramasser n'importe quelle plante est dangereux."

En entendant cela, je m'indigne, je bouillonne...
Les grainetiers industriels ont ouvert la brèche dans laquelle tous les industriels veulent s'engouffrer.

"Ramasser des plantes" est assimilé à "faire n'importe quoi".
"Un minimum de contrôle" signifie que le droit encadrera chacun de nos gestes ne conduisant pas à l'achat de produits modifiés par une industrie agréée
et l'intervenant de (sa) bonne foi considère qu'un particulier "ramasse n'importe quelle plante" et non pas celles qu'il sait ou suppose bénéfiques.
Entendre cela me scandalise et me renvoie également à un autre scandale législatif : celui qui interdisait aux simples citoyens de transmettre la recette du purin d'ortie.
Alors je vous le dis, amis de la terre et des terriens, la rébellion silencieuse et douce nous appartient. Ramassons des plantes, faisons du purin d'ortie, œuvrons dans l'ombre et la lumière pour que notre sous-sol et nos organismes restent ou redeviennent sains...

Le journaliste n'était heureusement pas complaisant et a ainsi posé la question qui m'agitait :

"Mais l'industrie pharmaceutique ne nous a pas toujours donné que des produits inoffensifs et sûrs. Pourquoi seraient-ils plus fiables que les plantes que nous ramassons ?"

Car combien de médicaments ont été retirés de la vente pour leurs effets secondaires désastreux ? Comment pourrait-on croire que les laboratoires sont moins intéressés par l'argent que par notre bien-être ? Qui nous fera avaler des médicaments dont nous ne connaissons pas les effets néfastes à long terme ?
Comme un clin d'œil par anticipation, j'avais intégré ce funeste projet de loi à mon roman "la folie des trisantesmes" dont le thème principal est justement le contrôle total des choix les plus élémentaires de la Société par les instances gouvernementales.
Petit extrait de mon roman en cours :

Celui-ci, je le prends ou je ne le prends pas ?

Impossible de déterminer s'il souffre à cause de sa maladie ou par la faute du traitement qui soigne tout et n'importe quoi.
Les pilules de Toutenlév se reconnaissent à leurs couleurs marbrées indéfinissables, ainsi qu'à leur forme aléatoire, pour ne pas dire biscornue. Celles qu'Eugène prenait avant étaient roses, bleues, ou blanches le plus souvent. Elles étaient bien rondes ou parfaitement ovales. Elles avaient un nom rassurant, connu depuis des années, Déflatil, Proctalor, Cuoromen... Il fallait parfois s'habituer à un médicament générique ; ces maudits génériques, autres couleurs, autres formes, autres noms... Mais bon, on s'y faisait et le cerveau s'en débrouillait très bien au bout d'un certain temps. Au moins, même en se distinguant des originaux, les génériques étaient toujours semblables à eux-mêmes.
Tout a changé avec le recyclage, l'anti-gaspillage, les trous cumulés de l'assurance sociale et de la couche d'ozone, le réchauffement de la planète et le refroidissement des finances, tous érigés comme alibis à une vaste réforme de société... Un nouveau courant est né et s'est imposé. Les gouvernants ont plongé dans le piège édulcoré. La radio d'Eugène, justement, lui délivre le message quotidien des chaînes publiques, un message tutoyifère et infantilisant, qu'il connaît pas coeur :

« Salut à toi, homme du présent ! Il te reste des médicaments périmés ou dont tu n'as plus l'usage ? Tu es soucieux de l'environnement et ne veux pas les jeter dans une poubelle ordinaire ? Alors n'hésite plus, ramène-les au centre de récupération des médicaments de ton quartier, ou de ton canton si tu es un rural. Tu feras ainsi un geste citoyen, responsable et gratuit.
C'était un message du collectif Trisantème, Tri SAnitaire et Naturel de TEs MEdicaments »

On nous prend vraiment pour des cons, songe-t-il en avalant néanmoins le remède trapézoïdale strié de brun. Et le pire, c'est que ça marche, pense-t-il en avalant son verre d'eau, lequel passe par le trou du dimanche. Je suis un con parmi les cons.
Malgré tout, il accepte sa condition, et cela ne l'empêche pas de souffrir toujours plus. Qu'est-ce qu'il faut faire ? Allez retrouver l'orientateur ? Je ne pourrais même pas conduire jusque là-bas...

La folie des Trisantesmes, Chapitre 2, Sébastien Haton

15 commentaires:

  1. Le générique n'est qu'une géniale invention des groupes pharmaceutiques. Comment vendre un produit au même prix mais en divisant la qualité par deux ou trois et réduire ainsi considérablement le coût de fabrication? Il n'y a pratiquement aucune différence de prix entre les deux médicaments à la vente chez le pharmacien. En revanche, si la molécule reste la même, les autres ingrédients sont vraiment ....... pour le générique!

    Bon, je m'en vais ramasser mon serpolet dans le fond du jardin pour ma tisane de ce soir et lire un vrai livre en papier, caché dans ma cabane souterraine; même si cela est interdit depuis l'arrivée du livre électronique!

    Humour et bonne soirée!

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  2. C'est curieux que tu parles des génériques parce que dans mon esprit, c'était peut-être le sujet le moins "sensible" de mon message... Je croyais que la spécificité du générique était l'absence de brevet à financer, mais tu sembles indiquer qu'il y a d'autres problèmes. Merci de m'avoir alerté sur le sujet.
    En attendant, continue à lire des livres en buvant tes plantes :))
    sébastien

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  3. Exemple tout simple et concret!
    Efferalgan 500mg 16 comprimés 1,80 eur.
    Doliprane ( paracétamol) 16 comprimés 1,74 eur.
    Paracétamol (GENERIQUE) 1,68 eur.
    la différence de prix est minime 6 cts, en revanche le générique a du mal à fondre bien qu'il soit effervescent, le goût est médiocre et il y a + de risques d'allergies chez les sujets sensibles. Nous payons un médicament de mauvaise qualité pratiquement au même prix que l'ancien... ( parfois la différence de prix est encore moindre) Vendu 0,95 eur. par exemple, nous pourrions trouver une contrepartie à la mauvaise qualité, mais là à ce prix c'est une grand arnaque! Un peu comme si tu achetez un produit qualité Leaderprice au prix de chez Fauchon! Ton sujet principal est bien sur très important mais je ne voulais pas mélanger les deux. De plus la marge des pharmaciens est beaucoup plus important sur la vente du générique!

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  4. Je comprends mieux pourquoi notre médecin traitant est contre... Merci de m'avoir alerté sur le sujet, je continuerai d'acheter les médicaments originaux... bien que de façon générale je déteste les médicaments.
    s.

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  5. Bof, ils peuvent faire passer ce qu'ils veulent, les gens continueront à faire ce qu'ils veulent.
    Les lois sont faites pour être contournées. Le système est juste à l'agonie, ce genre de textes le prouve une nouvelle fois...
    Je dirai même qu'au contraire, ce genre de conneries est tellement impopulaire, que ça risque de pousser les gens à produire par eux-mêmes, fait que je constate chaque jour !
    Alors faisons notre bière, notre pain, nos yaourts, notre fromage, notre gnôle, ... et tant pis pour les cons d'en-haut.
    Bises

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  6. C'est exactement ce que je pense... et c'est la réaction que je voulais susciter. Merci de partager mes convictions, Anonyme, et vivons, flûte, vivons fort !

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  7. Mais bien sûr, imaginons la gueule du procès :
    "Monsieur B., G. de son prénom, vous avez été interpellé pour avoir ramassé de la salsepareille ! Qu'avez-vous à dire pour votre défonce ? Euh, votre défense ?
    - Ch'uis un schtroumph !
    - Outrage à magistrat !!
    - Putain ch'uis vert...
    - Vous venez de vous griller, vous devriez être bleu si c'était vrai !!
    - C'était pour ma consommation personnelle...
    - 50kg ?!? M'enfin !
    - C'est pour ma bière...
    - Bien sûr ! Vous risquez la mort par décapitation, que plaidez-vous ?
    - Non-coupable !!
    - Vous êtes certain ?
    - Euh... Non, je plaide la folie, la folie bergère ! Je broute, je broute, je vous dis pas !!"

    Et la coupure de journal :
    "Première pendaison - peine clémente au regard du méfait - pour cueillette de plante naturelle dans l'ambiance bucolique du bocage breton. M. B.G. a été condamné à mort, suite à la découverte de 50kg de plante grasse dans son salon. Il aurait déclaré "c'est de l'herbe à chat, je suis en train de dompter deux gros félins en provenance du Congo Breton". La retransmission de la pendaison aura lieu à 20h32 sur TF1 entre le JT et la météo. (©Reuters - 2011)"

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  8. Une info concernant ton sujet principal, depuis déjà quelques années les grands laboratoires achétent tous les ouvrages de botaniques disponibles sur le marché! Ouvrages du XVIe, XVIIe, XVIIIe et XIXe. Pourquoi? la réponse est simple, ils veulent breveter toute la flore mondiale. Au fait, une précision, les laboratoires ne détournent pas les lois ils se contentent de les proposer clés en main aux parlementaires!

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  9. Ah ah ah ! Mon cher G.B., je te reconnais bien là :))
    J'imagine la question CRUCIALE :
    "Pouvez-vous jurer qu'au moment où vous avez ramassé cette herbe vous n'aviez aucunement l'intention de l'utiliser en tant que médicament ?"
    Au fait, comment est ta bière cette année ?

    Merci pour cette information de libraire, cothraige. J'avais pourtant cru comprendre que pour des raisons autant morales que juridiques, il allait être totalement impossible aux laboratoires de breveter la flore. Le droit international ne le permettra jamais, du moins je l'espère.

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  10. Le droit international ne devrait pas le permettre l'année prochaine, ni l'année suivante ni même dans les 5 prochaines années. Les objectifs des laboratoires appartiennent à un autre espace temps que le nôtre. Dans un premier temps ils tentent de nous habituer à l'idée de... Mais dans 30 ans? Pour le moment ils envoient des botanistes ( qui pensent travailler pour des associations...) un peu partout dans le monde vérifier sur place les textes des naturalistes-voyageurs et recueillir gratuitement auprès des autochtones un savoir qu'ils ignorent!

    Je prendrais bien une bière, en attentant!

    Bonne journée

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  11. Je ne suis pas inquiet sur ce point, la nature ayant un espace-temps qui dépasse celui des laboratoires :)
    Si tu aimes la bière, mon ami "anonyme" en fabrique lui-même une très bonne, et il est breton, en plus ! Demande-lui de t'inviter ou de venir la partager dans ta librairie ;)
    Amicalement,
    sébastien

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  12. Oyé !
    Grand Dieu, ils ont hélas déjà commencé à breveter "l'inbrevetable" ces bougres ! Et il n'y a pas que Big Pharma, Monsanto & Co n'est jamais loin...
    Au demeurant, des types comme nous s'en foutent car nous avons le choix et les possibilités, pour les pauvres agriculteurs des pays en émergence (j'aime pas le mot, mais bref), là ça devient plus limite car ils n'ont eux pas le choix, que les contraintes...
    Pour la bière, il faudrait dire LES bières, tant elles foisonnent en cette saison de basses températures idéales à la fermentation en cave. Et ma foi, les brassins augmentent en qualité, aux dires de ma testeuse préférée ! En outre, les partager est toujours un plaisir...
    Bises

    GB (alias Grand Barbu)

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  13. Vaste sujet, mon cher ami, je risque d'en reparler... de même que de l'alimentation. Quand je pense que les spécialistes (crétins) nous disent qu'ils réfléchissent à comment nourrir la planète en 2050... Mais à ce train-là, il n'y aura personne à nourrir en 2050 !!
    Bref bref, tu me manques et j'aimerais bien goûter à ta bière locale ;))
    Si tu veux passer des vacances de rêve en Bourgogne, bienvenue !
    S.H. (alias Saint Homme)

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  14. Arf, effectivement, vaste sujet, et ce n'est pas ma tendre moitié spécialiste en écotoxicologie (et tes souhaits) qui dira le contraire...
    Ben toi tu me manques pas du tout (profond travail d'auto-suggestion pour éviter un "pff" et autre "ma pov'dame oui").
    Allez, on va se planifier une visite, ça ne peut plus durer !!
    Bises

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  15. c'est ça ! Rapplique par ici !

    Et bises à ta tendre ;)

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