mercredi 28 décembre 2011

L'écologisme de la joie : Solution numéro 98, acte I

Après la Solution Numéro 92 : "comment dépolluer sa maison qu'on nettoie trop avec n'importe quoi", la solution numéro 8 : "comment éviter de comparer n'importe quoi avec autre chose qui n'est pas la même chose" et la solution numéro 37 "Comment contribuer à l'augmentation de la croissance économique en consommant moins", souhaitons la bienvenue à la solution numéro 98, acte I.

En raison de la taille exceptionnelle de cette solution hors normes, elle sera présentée en plusieurs morceaux. Mes lecteurs et lectrices les plus anciens reconnaîtront peut-être un message déjà publié par ailleurs.
La solution numéro 98 se propose de répondre à la problématique : "Comment vivre en autarcie et régaler ses amis avec un bon repas à base de quiche". C'est très simple, cela prend du temps, mais c'est très simple. Bienvenue dans un monde de quiche maison, acte I :

J'aime bien l'idée de présenter cette solution par parts. Voici donc la part 1, et ce n'est pas du franglais.
Il y a de cela un an, j'écrivais ceci :

"Le Verbe au Vert est à l'origine du lancement de la failed food, une mode culinaire consistant à rater les plats sans vergogne, et à les servir quand même.
Mais à l'instar de tout ce qui fait notre monde, cette nouvelle tendance ne peut faire abstraction de l'évolution de notre planète et des désagréments liés aux doutes concernant sa pérennité.
C'est pourquoi la prochaine recette que je publierai constituera une véritable révolution dans l'art de pratiquer l'auto-subsistance en l'alliant à l'art culinaire le plus raffiné. Plus qu'un plat, c'est un concept !"

Le ton était pompeux, le contenu prétentieux et pourtant il y avait derrière une intention extrêmement sérieuse. En effet, il me paraît indispensable de réfléchir dès à présent à un nouveau mode de consommation, avec des impacts directs sur notre façon de cuisiner.
Assez d'emballages et de suremballages de produits alimentaires !
Qu'on en finisse avec les provenances douteuses de denrées dont on méconnaît par trop les modes de culture et/ou de production !
L'avenir de la cuisine, dont cette recette sera le symbole, c'est la maîtrise. Maîtrise de la matière première, maîtrise des éléments, maîtrise totale.
Nous pouvons le faire. Sì, lo podemos !
Voici donc en exclusivité, avec tout le sérieux qui caractérise habituellement nos messages en écologisme joyeux
:


LA QUICHATON Lorraine, Part 1

Temps de préparation : 1 an. Pour une quiche servie en septembre 2018, vous auriez dû agir dès l'été 2017.
Temps de cuisson : 45 minutes à four chaud.
Prix de revient : environ 125 000 €, mais l'investissement initial pourra servir à élaborer un nombre élevé de quichatons.

Ingrédients

INFRASTRUCTURES
1 étable
1 porcherie
1 poulailler
1 écurie

POUR la PÂTE
1 rivière
1 champ
du blé à semer

POUR la MIGAINE (ou appareil)
1 pré en herbe
1 cheval de trait
1 vache normande
1 vache suisse
2 poules pondeuses
1 porc basque
1 jardin potager
1 petite forêt avec des hêtres
 

Des graines de plantes aromatiques
Graines de moutarde à semer
Bulbes d'oignons

MATÉRIEL DE CUISINE
1 saladier
1 moule à tarte
1 fouet

1 four à bois
1 hache
1 scie
1 fendeuse

RECETTE
Pour une quichaton pour 8 personnes à servir le 04 septembre 2018

- Septembre 2017 : Construction des infrastructures si vous n'en disposez pas déjà. Veillez à respecter les normes en vigueur et à bien fermer votre poulailler pour éviter que les prédateurs ne viennent vous zigouiller vos pondeuses. Acquisition des bêtes. Sélectionnez soigneusement les animaux que vous allez acheter, une vache laitière normande, une vache laitière suisse, deux poules pondeuses (de Bresse, par exemple), un cheval de trait de type percheron, un cochon basque.
Dès les premiers jours, traire la vache suisse qui a mangé du trèfle. Cela donnera un goût inimitable à l'emmenthal que vous allez immédiatement fabriquer afin qu'il s'affine un an, selon les recettes traditionnelles suisses.

Coupez un peu de bois de hêtre afin qu'il soit à peu près sec pour la cuisson. Il aurait fallu y penser avant, de toute façon.

"Pfouuu... Et tout ça à la main, évidemment !"

- Novembre 2017 : rentrer les animaux qui craignent le froid, sécuriser le poulailler en vérifiant qu'il n'y a aucune faille par laquelle une fouine pourrait passer.
Reposez-vous jusqu'en mars en veillant toutefois à nourrir quotidiennement vos bêtes avec des fourrages que vous aurez acquis à prix d'or auprès d'une ferme attachée à l'agriculture biologique. Donnez à votre cochon et à vos poules tous les restes de table et les épluchures, sauf si vous mangez n'importe quelle nourriture industrielle au contenu douteux, auquel cas vous seriez tenu de vous procurer des épluchures AB chez des voisins plus regardants.

- Fin Décembre 2017 : Tuez le porc, ne vous laissez pas attendrir par son regard implorant ni par ses cris de cochon qu'on égorge. Fumez sa poitrine au bois de hêtre, que vous aurez coupé et fait sécher vous-même, et mettez-la à pendre dans une grange sèche. Réservez dorénavant tous les restes de vos repas pour vos poules... enfin, si les renards ne les ont pas prises. Si le goupil est de la partie, renouvelez votre poulailler.

- Mars 2018 : Faites un premier labour du champ avec une araire tirée par votre percheron, peu profond, environ 8 centimètres. Vous vous serez assurés au préalable de l'innocuité du sol pour les cultures (cela va de soi).
Retournez légèrement la terre de votre jardin potager et commencez à semer
en poquets les herbes aromatiques précoces.
Vérifiez la nature de l'eau de la rivière en prélevant un échantillon que vous ferez analyser en laboratoire près de chez vous (allez-y en vélo). En fonction des résultats, agissez en conséquence, faites fermer des industries en amont, détournez le cours d'eau, etc. Refaites des analyses tous les mois jusqu'au jour de cuisine de la quichaton.
"Tu vois, fiston, dans quarante ans
le petit pourra faire une Quichaton !"

- Avril 2018 : Fumez le champ et le potager avec le fumier de votre cheval. Commencez à sortir vos bêtes dans les prairies qui s'enfleurent et s'enherbent. Rentrez-les le soir tant que la température descend trop bas la nuit. Même la vache suisse. Et si.

- Mai 2018 : Semez du blé dans le champ, plantez les oignons dans le potager. Surveillez la levée de vos aromatiques en poquets et repiquez-les dès que nécessaire. Laissez de plus en plus souvent vos bêtes paître au pré.


- Juillet 2018 : Moissonnez le blé à l'aide de votre cheval et de vos bras, amenez les épis au moulin artisanal de votre canton, qui les broiera à l'ancienne (par la seule force de l'eau) et récupérez la farine. Préférez cette solution à la coopérative, laquelle ne vous garantit pas la qualité des autres blés récoltés.
Retournez le champ après moisson, semez la moutarde.
Vérifiez et choyez les aromatiques.
N'oubliez pas vos bêtes. Jamais.

"Nan, Papy, tonton a dit pas les patates !
Y veut faire une quichaton, pas une patate-tarte !
- Oui, je sais. Mais d'ici qu'on la mange sa quiche,
moi je fais des patates !"


Dans l'intervalle, vous aurez pris soin de vérifier que l'emmenthal s'affine bien, que la poitrine fumée ne moisit pas trop et que toutes vos constructions agricoles ont tenu le choc de leur premier hiver...

Si tout va bien, vous êtes fin prêts pour la dernière ligne droite et la fin de la recette...

BIENTÔT, QUICHATON ACTE II !

A suivre

19 commentaires:

  1. La quiche à 75 000 euros... mwahaha ! Il est fou, Seb Haton, il est fou !

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  2. J'avoue ma flemme, avec 75000 euros je préfère racheter l'usine à quichamanouch actuellement en redressement judiciaire...

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  3. Il va de soi que, comme le dit le message, "l'investissement initial pourra servir à élaborer un nombre élevé de quichatons." :)

    Ma foi manouche, s'il n'y avait pas de résistance l'écologisme serait déjà vainqueur ;)

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  4. Déjà... les oignons et le gruyère dans la quiche, c'est hérétique selon ma tante Titine, d'accord sur ce point avec Jean-Marie Cuny, cuisinier lorrain bien connu...
    Ensuite, s'il faut tuer le cochon moi-même....
    J'abandonne la quiche pour la flamiche aux poireaux, spécialité de ma tante Christiane... le cri du poireau qu'on épluche ne m'impressionne pas...
    J'ai encore d'autres tantes à spécialités...mais qui ne collent pas avec le propos..
    La suite SVP

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  5. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

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  6. Harrumph!
    Pour une fois, je suis obligé de me distancier de cet écologisme simpliste.
    D'accord pour le poulailler et la vache suisse mais le fouet????
    Est-ce un fouet en acier, auquel cas 75000 euros et 1 an vous laissent bien loin du compte (comptez plutôt un milliard d'euros et trois ans pour l'aciérie)?
    Ou un fouet en plastique (j'en frémis)? Le pastique vous laisse le choix du coloris mais ne diminue pas la facture pour construire la raffinerie puis l'usine de plastique.
    (et encore, je vous fais cadeau de l'extraction des matières premières).

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  7. et post et belles et intéressantes, vous savez que j'aime la quiche lorraine heheh e tout le tart

    Je voulais vous souhaiter une bonne année nouvelle pleine de grande satisfaction, avec une affection sincère

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  8. En guise de fouet, je propose une brave fourchette Emmaüs dormant dans un tiroir ;-))

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  9. Ha,Ha,Ha!!!
    J'adore! Vivement la part II!

    Mais dis donc, comment tu t'y prends pour tous les autres repas qui seront servis d'ici septembre 2012?!? J'ai comme un p'tit élan d'inquiétude, là...
    ;¬D

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  10. Extra la recette :-)))
    Je ne m'étonne plus de ne pas (trop) aimer cuisiner !! et j'adore aussi les versions de Pomme, le cri du poireau m'indisposant nettement moins que les hurlements du cochon...

    Belle fin d'année, avec tout ça !

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  11. Ha ha, Pomme ! Mais ce n'est pas une quiche, c'est une quichaton. En passant, le terme "hérétique" me donne toujours l'impression qu'on va me brûler pour avoir trahi mon dieu, alors...

    Et pourtant, je te prie de me croire, Alba :))
    Bises.

    Ha ha ha, Emmanuel, tu es encore plus jusqu'au-boutiste que moi, ce doit être de famille ! Heureusement, ma "solution" prévoit qu'une sorte d'entraide se crée entre les autochtones d'un territoire. Il y a bien un fouet qui traîne quelque part dans les fermes de la région... Et si ce n'est le cas, nous connaissons un sculpteur sur bois qui nous le fera en acacia. N'avons-nous pas des ancêtres communs qui faisaient leurs outils eux-mêmes (en bois) ?

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  12. Grazie mille, Laura.
    I wish we kept in touch in 2012 as we did in 2011 ;)
    Have a great creative year.

    Bé voui, véro, d'autant que ça, on est sûrs d'en avoir ;))

    Pas de panique, Lucrecia ! Avec tous ces investissements, il y a moyen d'utiliser le potager et les animaux pour produire des tas d'autres aliments ! D'ici septembre 2012, il faudra tout de même se contenter de cueillettes diverses. Heureusement, je possède un excellent livre qui me dit ce qui est mangeable dans mon jardin et au-delà...

    Merci, Odile ;)
    Evidemment, je n'ai aucun mal à "tuer le poireau". Mais l'autarcie impliquerait l'acquisition de compétences qui pour l'heure me font vomir...

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  13. hahaha!

    T'es fou fou fou! Comme d'habitude...

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  14. Fou fou fou, mais pas fou ;))
    Bises de fin d'année,
    s.

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  15. J'adore encore ton texte tu ne fais pas un livre SEB

    Au fait non pour la fleur c'est un jasmin
    TU sais tout
    BISE je dois me bouger un peu

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  16. Un livre, France ? Mais bien entendu, c'est prévu ;))
    Je ne connaissais pas le jasmin.
    Bises
    s.

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  17. TU ne connaissais pas le jasmin donc chose faite maintenant
    OUI alors un livre tu as bien raison
    Je serai là pour le lire
    tu peux en être certain
    Bien je vais faire un café ensuite je vais tailler mes pierres
    Bonne journée

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  18. Formidable, France, alors je t'en réserve dès maintenant un exemplaire :))
    Bises et bonne taille de pierre,
    s.

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